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Relever le défi de l’insertion dans nos territoires

Nommée en 2020 à la tête de la Délégation interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté, Marine Jeantet nous présente les défis à relever pour sortir durablement les personnes en situation de précarité. Elle rappelle combien les acteurs de terrain et Pôle emploi ont un rôle essentiel pour prévenir et lutter contre la pauvreté.

Publié le  28/06/2021

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Quel est le rôle de la Délégation interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté ?

La Délégation a été créée en 2017 pour organiser la concertation sur la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté annoncée par le Président de la République en septembre 2018 et accompagner sa mise en œuvre, au niveau national et dans les territoires.

La stratégie pauvreté, issue d’une très large concertation de plus plusieurs mois, repose sur deux grands piliers : s’attaquer à la reproduction de la pauvreté  dès le plus jeune âge et sortir durablement les personnes de la pauvreté par l’insertion professionnelle. Pour atteindre les objectifs du 2ème pilier, le rôle de Pôle emploi est essentiel.

En 2020, la crise sanitaire a touché de plein fouet les personnes les plus précaires, confirmant ainsi le bien fondé des engagements de la stratégie pauvreté. Cette situation a conduit le gouvernement à recourir à de nouvelles mesures pour compléter et amplifier les mesures initialement prévues. Rapidement, nous avons ainsi mis en place des actions très concrètes, certaines s’inscrivant dans le cadre du plan de relance ou du Ségur de la santé, d’autres venant en complément. Nous avons notamment ajouté un volet de réduction des inégalités de santé, renforcé notre soutien aux associations luttant contre la pauvreté à hauteur de 100 millions d’euros, mis en place le déjeuner à 1 euro dans les restaurants universitaires,  majoré l’allocation de rentrée scolaire et avons ouvert des centres d’hébergement pour les grands marginaux. 

Avec la crise, nous avons dû également accentuer nos interventions pour favoriser l’insertion professionnelle des personnes en situation de précarité.  Pour cela, nous avons pu nous appuyer sur les compétences de Pôle emploi pour faciliter la mobilité des demandeurs d’emploi, mais aussi pour permettre à davantage de demandeurs d’emploi de bénéficier de dispositifs tels que les parcours emploi compétences et l’insertion par l’activité économique.

Localement, n’oublions pas que les acteurs de terrain ont un rôle essentiel pour prévenir et lutter contre la pauvreté. Aussi, afin de déployer l’ensemble de la stratégie pauvreté sur les territoires, nous avons nommé dans chaque région des commissaires à la lutte contre la pauvreté qui, avec les Préfets, coordonnent les collectivités locales et les acteurs locaux comme la CAF, la CPAM et bien-sûr les agences Pôle emploi.

Nous avons aussi innové en contractualisant avec les collectivités en charge des compétences sociales, et en premier lieu les conseils départementaux mais aussi les régions et les métropoles. 99 départements sur 101 ont signé une convention avec l’Etat et bénéficient de co-financements afin de mettre en place des politiques sociales décentralisées. Un premier bilan sera réalisé à l’automne 2021, après trois ans de contractualisation avec les conseils départementaux.
 

Compte tenu de la crise actuelle, quels sont les principaux défis à relever collectivement pour favoriser l’inclusion des personnes les plus en difficulté ?  

Les fondamentaux de la stratégie pauvreté restent les mêmes qu’à la création de la délégation et les défis aussi. Ils sont encore plus d’actualité compte tenu de la crise. Nous devons donc encore mettre plus d’énergie à les relever.

En France, le taux de pauvreté est de l’ordre de 15 %, un des plus faibles d’Europe. Sans notre système social généreux de redistribution, ce taux serait de 22 %. Cependant, il faut six générations dans notre pays pour sortir de la pauvreté alors qu’en Europe la moyenne est de cinq. L’ascenseur social ne fonctionne plus comme avant.

Notre stratégie est donc d’agir sur l’enfance et la jeunesse. Par exemple, un enfant issu d’une famille en dessous du seuil de pauvreté a, en CP,  en moyenne 1 000 mots de moins dans son vocabulaire qu’un autre enfant. Les places dans les crèches et l’accueil collectif dès le plus jeune âge sont pour la délégation une priorité, notamment dans les quartiers prioritaires. La distribution des petits déjeuners en maternelle et en primaire en est aussi une. 

Nous proposons d’ailleurs pour les territoires ruraux un soutien de l’Etat pour les communes de moins de 10 000 habitants afin de favoriser les repas à moins de 1 euro pour les familles modestes. 

L’obligation de formation pour les 16-18 ans est aussi une priorité avec des actions spécifiques pour les jeunes décrocheurs. Pour cela, l’objectif est d’améliorer les liens entre l’Education nationale, les missions locales et tous les acteurs de l’insertion de la jeunesse sur les territoires. Les solutions pour ces décrocheurs sont  diverses : une formation, l’apprentissage, l’Ecole de la 2ème chance, l’Epide, etc. 

Il est aussi important de rappeler que la crise a accentué la fracture numérique et fragilisé encore plus les bénéficiaires du RSA et les jeunes désocialisés. Nous avons du mal à les capter et faire en sorte qu’ils s’inscrivent à Pôle emploi. Les jeunes diplômés sont aussi fragilisés par la crise. Nous devons tout mettre en œuvre pour qu’il n’y ait pas de génération sacrifiée. Nous devons aider les jeunes à retrouver de l’espérance. 

La santé – notamment mentale -  fait également partie de nos sujets d’attention. Pôle emploi a un rôle à jouer et son partenariat avec la CNAM pour mieux diagnostiquer les problématiques de santé des demandeurs d’emploi est essentiel. 
 

Qu’attendez-vous de la coopération entre Pôle emploi et les collectivités territoriales dans la mise en œuvre de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté ?

J’en attends une mobilisation totale et générale pour favoriser l’insertion des personnes les plus éloignées de l’emploi. Ces publics, et notamment les bénéficiaires du RSA, nécessitent une attention toute particulière car ils ont besoin qu’on leur accorde plus de temps et plus d’énergie.

La montée en charge de l’accompagnement global, qui fait partie de la contractualisation avec les conseils départementaux, est une priorité  avec un objectif ambitieux de 200 000 personnes accompagnées en 2022 contre 100 000 jusqu’à présent. Ce travail commun de Pôle emploi et des conseils départementaux, où chacun apporte ses compétences autour d’une personne, est essentiel. Les commissaires à la pauvreté seront attentifs à une bonne prise en charge de cette population et aux difficultés qui pourront apparaître localement.

L’insertion par l’activité économique est aussi un levier efficace pour permettre aux personnes les plus en difficulté de retrouver le chemin de l’emploi. Je sais compter sur Pôle emploi pour renforcer les orientations vers ces structures d’insertion et contribuer à la réussite du Pacte d’ambition dont l’objectif est de passer de 140 000 à 240 000 postes d’ici 2022.  

La formation est également une solution à activer pour accélérer l’accès ou le retour à l’emploi mais aussi sécuriser les reconversions professionnelles des personnes touchées par cette crise.

Enfin, Pôle emploi est un opérateur clé du Service public de l’insertion et de l’emploi en cours de construction avec les conseils départementaux. L’ambition de tous les acteurs contribuant à la mise en œuvre de ce projet est de renforcer l’efficacité de l’accompagnement en proposant des parcours « sans couture » avec une meilleure prise en compte des questions liées au logement, à la mobilité, l’inclusion numérique, la santé, la précarité financière ou l’illettrisme. 

 

Dès la fin de l’année 2020, un premier appel à projet a été lancé sous l’impulsion de Mme Brigitte Klinkert, Ministre déléguée auprès de la ministre du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion, chargée de l’Insertion. Aujourd’hui, nous travaillons étroitement avec les collectivités territoriales et Pôle emploi pour relever ce défi de l’insertion dans nos territoires.
 

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